Cinéma à l’Omnia : « Une Enfance » de Philippe Claudel

Ce sont les 5 ans de l’Omnia à Rouen. Philippe Claudel, écrivain et cinéaste, est venu les fêter. Il a présenté Une Enfance, un quatrième film qui sortira mercredi 23 septembre. Certainement le plus autobiographique puisqu’il filme sa région, la Lorraine, et sa ville natale, Dombasle-sur-Meurthe.

 

Philippe Claudel_portraitUne enfance n’est pas seulement l’histoire d’un garçon.  C’est aussi le portrait d’une famille et d’une région. Philippe Claudel filme sous une lumière estivale la Lorraine, notamment Dombasle-sur-Meurthe. « Je n’ai pas bougé depuis mon naissance. C’est un port d’attache et un observatoire. C’est d’ailleurs ce qui manque aujourd’hui à tous les hommes politiques et aux artistes afin qu’ils se rendent compte de ce qu’est la vie. Tous les jours, je vois des personnes confrontées à la dureté de la vie », confie le réalisateur et écrivain.

 

Dans cette petite ville, entre sites industriels à l’abandon et des habitations modestes, entre végétation en fleur et canaux nonchalants, Jimmy, un garçon de 13 ans, vit avec son demi-frère, Kevin, sa mère, Pris, et son nouveau compagnon, Duke. Tout commence par une discussion entre amis. Duke se lâche. Il refuse tout modèle de société et multiplie les propos racistes et les solutions faciles pour redresser un pays en crise. Des propos à aller chercher du côté des partis les plus extrêmes. « C’est ce que j’entends autour de moi. Dans le film, j’ai même eu tendance à alléger le tableau parce que le cinéma est une loupe ».

 

Une Enfance devient le portrait d’une région délaissée, d’une famille à la vie chaotique. Duke, vrai bad boy, vit de trafics en tout en tout genre, de larcins et des allocations de sa compagne qu’il domine. Le quotidien est rythmé de programmes télé et de soirées avec bière et drogue. Pris est une femme soumise, paumée et une mère immature. Elle ne sait pas comment se comporter avec ses deux fils, nés de deux relations précédentes. Elle peut à la fois être très lointaine et avoir des excès de tendresse qui vont jusqu’à l’impudeur.

 

 

 

 

Pas facile de vivre pleinement son enfance dans ce contexte orageux. Tout se déroule sous les yeux fermés des voisins, de la personne des services sociaux. Jimmy, 13 ans, encore en CM2, est un garçon silencieux, secret et rêveur. Il devient un véritable adulte quand il faut réveiller son petit frère, le consoler après un cauchemar, préparer le repas… Seuls moments de petit bonheur : caresser et donner à manger à un chaton blanc, effectuer des promenades en solitaire à vélo dans la campagne sur la musique de Ray LaMontagne. « C’est la voix intérieure du gamin ». Dans la vie de Jimmy, il y a aussi le tennis. Le garçon traîne régulièrement près des courts de tennis de la ville. Son visage s’illuminera seulement à la fin du film lorsqu’un entraineur, joué par Philippe Claudel, admirateur de Jimmy Connors, l’invite à échanger quelques balles. « Je n’aime pas jouer. Lors du tournage, je me suis dit que l’entraîneur, c’était moi. Moi aussi, je tournais autour des courts. Dans le film, je me devais de tendre la main ».

 

Il n’y a pas de clichés dans Une Enfance, porté par d’excellents comédiens. Philippe Claudel raconte une vie sans faux-semblants, surtout avec un regard bienveillant. Après le cinéma, Philippe Claudel est revenu à l’écriture. « L’alternance est charmante ». Il a écrit L’Arbre du pays de Toraja, un nouveau roman qui sortira en janvier 2016.

 

  • Une Enfance de Philippe Claudel avec Alexi Mathieu, Jules Gauzelin, Angelica Sarre, Pierre Deladonchamps, Patrick d’Assumaçao… Sortie mercredi 23 septembre.