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Théâtre au CDN : « La Tempête », version franco-burkinabè

photo J.P. Retel

Le Mois Shakespeare se poursuit au CDN de Haute-Normandie avec La Tempête. Créée au Burkina Faso, la pièce, mise en scène par Thierry Roisin, est présentée les 14 et 15 janvier au théâtre de La Foudre à Petit-Quevilly.

 

photo J.P. Retel
photo J.P. Retel

Un premier Shakespeare. Il n’y a pas de lien avec le 400e anniversaire de la mort du dramaturge anglais, mort en mai 1616. Pour Thierry Roisin, « il est difficile de faire du théâtre sans être interpelé par Shakespeare. Celui-ci concentre ce qu’est le théâtre, avec ses fondements les plus puissants, une extrême trivialité, un regard sur les hommes ». L’ancien directeur du centre dramatique national de la Comédie de Béthune, centre dramatique national du Nord-Pas-de-Calais, met en scène sa première pièce de Shakespeare. Pourquoi maintenant ? Thierry Roisin s’est concentré sur son poste de direction pendant neuf ans, jusqu’en 2013. « Un tel projet culturel et artistique demande une présence sur le territoire très forte. En sortant, j’avais besoin d’entamer un projet-aventure intense. Entrer dans le continent Shakespeare, c’est entrer dans un monde gigantesque, un territoire extrêmement arpenté mais tellement riche et puissant qu’il y a de la place pour tout le monde ».

 

Un choix entre deux pièces. « Dans l’œuvre de Shakespeare, deux pièces toquent à la porte : Le Roi Lear et La Tempête ». Thierry Roisin a choisi la seconde, « plus énigmatique, plus philosophique ». La Tempête est un texte joué pour la première fois en 1611. Elle raconte l’histoire de Propero, un magicien influent exilé avec sa fille Miranda. Après plusieurs années passées sur une île inconnue et magique, il décide de se venger des hommes qui l’ont dépossédé du duché de Milan. Pour cela, il demande l’aide d’Ariel, un esprit de l’air pour provoquer une tempête. Lors de ce gros coup de vent, un navire échoue. Pas n’importe lequel. Le bateau transportait Alonso, le roi de Naples, Sébastien, son frère, et Antonio, le frère de Prospero et homme cruel, qui se retrouveront en divers endroits de l’île. Tous sont là pour parvenir à la vérité.

 

 

 

Une pièce de contrastes. La Tempête est une tragi-comédie. Pour Thierry Roisin, « cela fait partie du génie de Shakespeare. Il parvient à juxtaposer des moments de drames et des moments comiques. Il peut y avoir des scènes très truculentes ». Autres contrastes : la magie se confronte au réel et l’ordre succède au chaos. « Il y a eu un chaos passé. Un ordre s’est construit qui va être à nouveau mis en péril. Vont naître de nouvelles alliances qui vont déboucher sur un chaos, puis sur un nouvel ordre. Or, rien n’a changé. Shakespeare ne donne aucune conclusion. Il observe », explique Thierry Roisin. Dans son travail, le metteur en scène a cherché à rendre les contrastes les plus aigus possibles. « Une scène est intéressante si elle est sur le fil. Dans cette pièce, tout peut basculer, rien n’est figé dans l’éternité, tout peut arriver ».

 

Une rencontre entre deux cultures. Thierry Roisin a créé La Tempête au Burkina Faso, quelques jours après le coup d’état de septembre 2015. Une évidence pour le metteur en scène. Dans La Tempête, le surnaturel tient une place importante. « Il y a la présence des esprits, une forme de transcendance du réel. Nous sommes loin de notre rationalité. Il était donc nécessaire de rendre cette dimension palpable. Je ne voyais pas bien comment des comédiens occidentaux pouvaient donner cette dimension. Aujourd’hui, nous voulons tout expliquer et notre société s’est coupée de ces forces. En Afrique, le commerce des esprits est quelque chose d’actuel ». Lors d’un stage, Thierry Roisin travaille avec différents acteurs burkinabés et complète sa distribution avec des comédiens français. « La rencontre entre deux cultures est aussi le trait marquant de cette pièce. Il y a un débat lié à la colonisation. Il était important d’éprouver cette rencontre sur place à un moment où l’étranger est au centre de beaucoup de discussions ».

 

 

  • Jeudi 14 et vendredi 15 janvier à 20 heures au théâtre de La Foudre à Petit-Quevilly. Tarifs : 18 €, 13 €. Réservation au 02 35 03 29 78 ou sur www.cdn-hautenormandie.fr
  • Rencontre avec l’équipe artistique à l’issue de la représentation du vendredi 15 janvier.