/

Chloé Dufresne : « le plus difficile dans cette pièce est de garder le rythme »

photo : Capucine de Chocqueuse

Le Prince Caprice veut aller dans l’espace. C’est donc parti pour Le Voyage dans la lune. Cet opéra-féerie, composé par Jacques Offenbach en 1875, est une folle expédition racontée du 4 au 8 novembre au Théâtre des Arts à Rouen. La pièce, mise en scène par Olivier Fredj, est dirigée par Chloé Dufresne qui retrouve l’orchestre de l’Opéra de Rouen Normandie. Entretien avec la jeune cheffe qui enchaine multiples projets.

Pourquoi l’œuvre d’Offenbach, Le Voyage dans la lune, reste rare dans les programmations ?

Elle est en effet peu jouée. Cela est dû à plusieurs raisons. Nous allons interpréter la nouvelle éditions du Palazzetto Bru Zane qui a récupéré des extraits perdus. Ce sont quatre airs de la reine Popotte. La version originelle du Voyage dans la lune dure quatre heures ; la première a même duré six heures. Elle demande un budget conséquent et un imposant décor. La pièce peut donc faire peur. Le Palazzetto Bru Zane a réécrit une version avec une partition plus lisible.

Qu’est-ce un opéra-féerie ?

C’est un nouveau genre qui s’est imposé avec Offenbach. Le Roi Carotte est aussi un opéra-féerie. C’est un mix d’opérette et de grand opéra avec un thème féerique. Il y a aussi un côté joyeux. Offenbach avait l’habitude de composer des opérettes pour des petits théâtres. Cette fois, il a la possibilité de présenter une de ses pièces sur une plus grande scène, le théâtre de La Gaîté. Il va alors explorer de nouvelles couleurs et créer différentes atmosphères.

Y-a-t-il des ambiances romantiques ?

Il y a beaucoup de thèmes qui se rejoignent dans Le Voyage dans la lune. L’œuvre raconte aussi une histoire d’amour, la découverte de nouveaux modes de vie, que ce soient les rapports entre les hommes et les femmes ou entre humains.

Les personnages portent des prénoms ridicules. Faut-il lire une satire dans cette œuvre ?

Cette pièce aborde la question de pouvoir. Si le roi V’lan est très autoritaire avec son peuple, il ne l’est pas du tout avec son fils. Offenbach a toujours critiqué le pouvoir de manière humoristique. Dans La Voyage dans la lune, chacun peut aussi y voir ce qu’il veut. Nous avons deux sociétés complètement différentes et chacune est persuadée que l’autre n’existe pas. Il y a là la confrontation de deux cultures. Et chacun doit se remettre en question.

Comment avez-vous appréhendé cette œuvre d’Offenbach ?

Dans un premier temps, je travaille toujours sur le livret pour comprendre quels sont les enjeux, découvrir ce qui se joue. Je rentre ensuite dans la musique. J’essaie de comprendre les personnages. La musique donne leur couleur et une cohérence. Puis j’apprends la partition. Je fais mon interprétation qui peut être flexible. Il faut que tout cela ait un sens. Le plus difficile dans cette pièce est de garder le rythme avec le texte, la musique, les bruitages… Il y a un risque qu’elle devienne morcelée. Il faut faire des enchainements rapides, poser des silences, créer des tensions. Mais le plus important reste d’obtenir une continuité.

Avez-vous relu les histoires de Jules Verne avant de travailler sur Le Voyage dans la lune ?

Non, je me suis davantage inspirée d’images. J’ai regardé les films de Georges Méliès. Toutes ces images d’époque furent assez instructives. Elles ont nourri mon imaginaire. Je me suis aussi plongée dans l’univers de 1875 pour comprendre l’œuvre. Je me suis demandée ce qu’était cette société et comment elle pouvait nous parler.  À cette époque, personne n’avait encore marché sur la lune. On venait juste d’inventer le train.

Est-ce que l’espace et ces voyages vous fascinent ?

Oui. Cette volonté d’aller sur Mars sur me fascine. Avec les consciences des problèmes que l’on a aujourd’hui, il faut se demander quel en est l’intérêt. C’est une quête de toujours plus. Cependant, cette conquête de l’espace reste néanmoins captivante parce que tout cela demeure inaccessible.

Avec Le Voyage dans la lune, vous retrouvez l’orchestre de l’Opéra de Rouen Normandie.

C’est l’orchestre avec lequel j’ai le plus travaillé. Nous avons enregistré Piccolo et Saxo, fait la tournée de rentrée de la saison dernière et joué la Symphonie n°1 de Beethoven lors de la traversée de la Seine de Nathan Paulin. J’adore revenir ici. J’aime cette ville de Rouen qui est belle et à taille humaine. L’orchestre est un ensemble que j’apprécie, qui travaille vite et efficacement. En fait, c’est l’inconnu qui est stressant. Diriger un orchestre que l’on connaît permet de porter les inquiétudes ailleurs.

Une expédition

photo : Marc Ginot

Avant de transmettre sa couronne à son fils, le roi V’lan veut emmener Caprice sur la lune. Celui-là en rêve. Il charge alors Microscope, le savant de l’observatoire, de construire un engin pour effectuer ce voyage vers le satellite de la Terre. Les trois hommes seront du voyage. Persuadés de découvrir une lune déserte, ils vont croiser les Sélénites, les habitants de la lune, notamment Cosmos, le roi, Popotte, sa femme, Fantasia, sa fille et Cactus, son conseiller. Suit une histoire de pomme, d’élixir et d’amour. Les trois Terriens devront trouver une solution pour revenir au royaume. 

Le Voyage dans la lune d’Offenbach (1819-1880) est un opéra-féerie en quatre actes et 23 tableaux remplis de magie. Les trois librettistes, Albert Vanloo, Eugène Leterrier et Arnold Mortier, se sont inspirés des aventures de Jules Verne pour écrire cette œuvre, créée à Paris au théâtre de La Gaîté. L’orchestre de l’Opéra de Rouen Normandie interprète une version éditée par le Palazzetto Bru Zane.

Infos pratiques

  • Vendredi 4 novembre à 20 heures, dimanche 6 novembre à 16 heures et mardi 8 novembre à 20 heures au Théâtre des Arts à Rouen
  • Durée : 2 heures
  • Introduction à l’œuvre 1 heure avant chaque représentation
  • Spectacle en audio description le dimanche 6 novembre
  • Tarifs : de 68 à 10 €. Pour les étudiants : carte Culture.
  • Réservation au 02 35 98 74 78 ou sur www.operaderouen.fr

Des places sont à gagner

  • Relikto vous fait gagner des places pour la représentation du vendredi 4 novembre au Théâtre des Arts à Rouen. Tentez votre chance en envoyant un message à muriel.relikto@gmail.com