Une vie à Paris et au Liban

photo : Patrice Normand

Dans Beyrouth-sur-Seine, un roman drôle et riche d’émotions, Sabyl Ghoussoub raconte la vie d’une famille qui a désormais sa vie en France et son cœur au Liban. Il sera samedi 21 janvier au Havre pour deux rencontres lors du festival Le Goût des autres.

L’écriture du roman achevée, il a ressenti « un léger soulagement. Et davantage encore quand le livre a été publié. J’ai eu l’impression de rendre justice à mes parents. Ils sont exilés et ont perdu leurs rêves d’enfance. J’ai rempli un vide chez eux ». Le roman, c’est Beyrouth-sur-Seine, récompensé par le prix Goncourt des lycéens 2022, et l’auteur, Sabyl Ghoussoub, journaliste, écrivain, fan de photos et de cinéma.

Dans Beyrouth-sur-Seine, Sabyl Ghoussoub raconte la vie d’une famille, la sienne, à travers l’histoire du Liban. Ou l’inverse. Cette famille apparaît comme un concentré de ce pays. « Chaque membre porte des sentiments différents et j’accentue les traits. Il est vrai que tous les bords politiques sont représentés. Certains sont très politisés. Les autres ont pris les armes. Il y a les pro-Palestiniens et les pro-chrétiens. On retrouve toutes les sensibilités ». Peu importe, « la famille, c’est sacré », fait-il répéter à sa mère. « La famille est ce qui la relie à son pays, ce qui lui reste de ce pays. Elle garde ainsi le lien. C’est différent pour mon père ».

Comprendre

Sabyl Ghoussoub porte un regard tendre, inquiet, politique et très sincère sur cette famille et ce pays. Il raconte avec légèreté et profondeur selon les événements, heureux ou tragiques. Kaïssar et Hanane, deux personnes attachantes, ont quitté le Liban pour vivre à Paris en 1975 et échappé à une guerre civile. Ce qui devait être d’une courte période dure encore. Le couple s’installe, trouve un emploi, a deux enfants, Yala et Sabyl. Et le temps passe… Pour tous, la vie est en France mais « le cœur bat là-bas ».

Beyrouth-sur-Seine parle d’exil, de déracinement, de reconstruction, de rapport à un pays, d’attentats, de guerre… Cette guerre qui est omniprésente. Il y a chez Sabyl Ghoussoub cette tentative de comprendre ce pays où il a vécu. « Je ne sais plus qui tire sur qui, qui se bat contre qui, qui s’allie avec qui », écrit-il. « Je lis beaucoup sur cette guerre. Mais, à un moment, on a marre. Le Liban est un tout petit pays avec un grand nombre de micro partis. Il faut accepter que l’on soit perdu. J’en ai aussi assez que des gens m’expliquent cette guerre alors qu’ils ne la comprennent pas. Qui a raison ? Qui a tort ? On ne sait pas. Nous voyons qu’il y a beaucoup d’assassinats et que les mères ne savent pas où sont leur mari, leur père, leur enfant. Seule la justice nous permettra de tout comprendre ». Et cette guerre a « rattrapé » les parents de Sabyl Ghoussoub en France. Il le démontre avec la liste des attentats perpétrés notamment dans les années 1980.

Pour raconter cette histoire, l’auteur a interrogé ses parents. Des scènes qu’il narre avec beaucoup d’humour. Ensuite, « il a fallu trouver la justesse et le bon endroit ». Il y est parvenu en prenant « beaucoup de recul. Ce fut possible parce que je suis loin du Liban. Et je me suis laissé guider par l’émotion ». Émotion partagée.

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