Jean-Claude Gallotta : « Ulysse a fait que je suis entré dans la danse malgré moi »

photo : Paul Callet

Jean-Claude Gallotta reste un des chorégraphes les plus audacieux avec une écriture riche, évocatrice et facétieuse. Depuis plusieurs saisons, il a pris l’habitude de revisiter son répertoire, entre deux créations. D’Ulysse, il en a écrit plusieurs versions avant cette « recréation 2021 » pour fêter ses 40 ans. À ce ballet blanc pour dix interprètes datant de 1981, le chorégraphe met en miroir une pièce tout en noir, Pénélope. Il multiplie sur scène ce personnage, telle une figure de toutes les femmes empreintes d’une vive énergie. Les deux spectacles sont présentés mardi 14 et jeudi 15 mars à la scène nationale de Dieppe avant la représentation de Pénélope au Volcan au Havre les 16 et 17 mai. Entretien avec Jean-Claude Gallotta.

Que représente ce couple, Pénélope et Ulysse, pour vous ?

Il est éternel. C’est la situation première pour être amoureux. Il y a ce besoin récurrent d’un retour à ce couple. Parfois, on peut aussi inverser les rôles. Lui reste au foyer et elle voyage.

Est-ce que Homère est une source d’inspiration ?

Quand j’ai écrit Ulysse, je ne suis pas parti de l’œuvre d’Homère. Avant cette création, j’étais plus dans la performance, une théâtralité. Or je voulais aller vers une gestuelle. J’ai voulu faire mon chorégraphe, en fait. J’ai créé un ballet d’une heure et demie avec huit danseurs. Ce qui ne se faisait pas dans la danse contemporaine. Comme il fallait un titre un peu porteur, j’ai considéré qu’Ulysse, c’était pas mal. Chacun peut y mettre son mythe et inventer tout ce que je n’ai pas dit. En revanche, avec Pénélope, je me suis inspiré d’Homère. 

Avez-vous besoin d’histoire pour écrire une chorégraphie ?

Non, même quand je raconte. Je commence à travailler dans le silence sans vraiment avoir d’histoire en tête. Je donne des indications aux danseurs. On peut parler d’abstraction mais, pour moi, cela ne veut rien dire. Chaque être humain est porteur d’histoires parce que le corps parle. Nous sommes dans cet aller et retour. La danse, ce sont des pas effectués les uns après les autres sur un rythme et dans un espace donné. C’est tout simplement cela. Il faut y ajouter de l’énergie. Dans mon travail, j’ai en fait tout mélangé. Avec le temps, c’est le style qui est important. J’ai fait avec ce que j’étais. J’ai ainsi trouvé une tranquillité d’esprit pour faire ce que j’avais à faire.

Est-ce simple pour y parvenir ?

À un certain moment, on se demande toujours si on est encore dans le coup, quelles sont les tendances, où on se situe dans la danse contemporaine. Non seulement il y a les jeunes pousses qui arrivent mais aussi les critiques. C’est difficile. On s’en fait beaucoup. Puis, on s’en détache et on s’accepte.

Ce n’est pas le première fois que vous revenez à cette chorégraphie, Ulysse. Pourquoi celle-ci ?

Elle a souvent été demandée. Pourtant, je la trouvais trop illustratrive. J’y suis revenu parce qu’Ulysse a fait que je suis entré dans la danse malgré moi. Cette création a une place symbolique dans la nouvelle danse française. Dans ce jeu d’alternance entre créations et reprises de pièces du répertoire, Ulysse pointait toujours son nez. Il y a eu les Variations d’Ulysse

Vous reprenez Ulysse et vous créez Pénélope, un premier ballet blanc et un second noir. Est-ce que cette couleur choisie exprime l’enfermement de cette femme ?

Non, pas du tout. C’est simplement un jeu de mise en miroir. J’avais aussi le souvenir d’un film avec Silvana Mangano qui joue une Pénélope, habillée tout en noir. Elle était très belle.

Qui est votre Pénélope ?

J’ai imaginé une Pénélope dynamique. Elle est plusieurs femmes. La danse s’amuse avec les variations possibles de la femme. J’ai écrit un ballet en quatre parties avec une première où Pénélope est entourée d’hommes voulant la séduire. J’ai voulu ensuite une inversion. Dans la troisième partie, les femmes sont fières et deviennent des guerrières. À la fin, il y a le retour de l’amour des êtres.

Des textes accompagnent cette chorégraphie.

J’aime beaucoup les textes de Claude-Henri Buffard, ce mélange d’une écriture et de la danse qui crée une sorte de dialogue.

Infos pratiques

Ulysse

  • Mardi 14 mars à 20 heures à la scène nationale de Dieppe. Durée : 1h15. Tarifs : de 23 à 10 €. Réservation au 02 35 82 04 43 ou sur www.dsn.asso.fr

Pénélope

  • Jeudi 16 mars à 20 heures à la scène nationale de Dieppe. Durée : 1h15. Tarifs : de 23 à 10 €. Réservation au 02 35 82 04 43 ou sur www.dsn.asso.fr
  • Mardi 16 mai à 20h30 et mercredi 17 mai à 19h30 au Volcan au Havre. Tarifs : de 24 à 5 €. Pour les étudiants : carte Culture. Réservation au 02 35 19 10 20 ou sur www.levolcan.com