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Tania de Montaigne à La Galerne

Photo : JF Paga

Dans un livre rempli d’humour, Tania de Montaigne pointe ces pratiques de réécriture de textes littéraires. L’écrivaine et journaliste sera présente vendredi 19 janvier à La Galerne au Havre pour parler de Sensibilités dans le cadre du festival Le Goût des autres.

Surtout ne pas froisser ! Encore moins heurter ! Pour parvenir à cet objectif, une salariée de Feel Good est prête à demander aux écrivains de sa maison d’édition de bannir certains mots ou tournures de phrases. Une décision prise après la tentative d’assassinat d’un romancier. L’auteur des 18 coups de couteau explique son geste par une légitime défense. Il s’est senti agressé par les propos du livre. Avec Feel Good, les lecteurs doivent être « heureux et calmes ».

« Heureux et calmes », certes mais à quel prix ? Celui d’un renoncement. C’est tout l’objet du nouveau roman de Tania de Montaigne. Sensibilités est « parti d’un fait qui m’a frappée. À la sortie de Noire, la vie méconnue de Claudette Colvin, je me suis rendu compte lors des interviews et des rencontres que ce mot, noir, agitait des réflexions. Le livre a ensuite été adapté en bande dessinée par Émilie Plateau. Ce qui est génial. Nous avons réalisé un exemplaire pour le montrer aux éditeurs anglo-saxons. Là, on nous a demandé d’intituler le livre, non pas Noire mais Bus. Cela nous a interpellées. Comme Émilie est blanche, cela pouvait faire de la peine aux Noirs ».

La liberté en question

Pour évoquer ce sujet, Tania de Montaigne qui sera vendredi 19 janvier au festival Le Goût des autres au Havre a préféré la fiction. La raison : « elle est toujours mise en accusation. On demande à une fiction d’apporter les preuves qu’elle est vraie. Cela aboutit à des conséquences très étranges », souligne l’autrice. La première : l’artiste garde-t-il la liberté de créer ? « L’intérêt de son travail est d’éprouver des choses. Il doit préserver sa liberté et le public a cette liberté de regarder ou pas une œuvre. Il est impératif de revenir à l’endroit de l’imaginaire ». 

Que devient également la richesse des échanges ? Réponse de l’autrice : « si tout est borné, il n’y a plus besoin de débattre. Nous ne pouvons pas faire l’économie du dialogue. C’est un rêve puéril. Les rapports humains sont basés sur des malentendus, des bizarrement entendus. Personne ne veut être un angelot ».

Un sujet de fond

Effacer des mots ne résout pas non plus les problèmes. « Il serait préférable de s’interroger sur la question du racisme, sur les discriminations. Tous les jours, des gens ne sont pas représentés. C’est une question de fond qui nécessite des réponses et une mobilisation de tout le monde. Le personnage de Sensibilités est comme toutes ces personnes trop sympathiques qui veulent réparer le monde. Ce qui les met en route, c’est leur bonne intention. Si c’était efficace, cela se saurait. C’est quelque chose d’enfantin, d’absurde et de délirant ».

Absurdes, ce sont les situations imaginées par Tania de Montaigne dans Sensibilités. Dans cette fable, remplie d’humour, elle n’hésite pas à amener chaque principe souhaité par l’éditrice jusqu’à son extrême afin de faire « comprendre ce qu’est le racisme. Je te dis comment tu parles ». Tania de Montaigne revient enfin à un sujet qui l’anime, l’assignation. « Cette question d’être assignée, je la ressens fortement et depuis toujours ».

Infos pratiques

  • Vendredi 19 janvier à 17 heures à La Galerne au Havre
  • Durée : 45 minutes
  • Entrée gratuite
  • Réservation au 06 37 53 30 99 ou à legoutdesautres@lehavre.fr