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Souad Massi : « lire permet de méditer »

photo : Yann Orhan

La littérature est une échappatoire et une source d’inspiration pour Souad Massi. L’autrice et compositrice peut prendre des chemins de traverse vers la poésie. Comme dans cet album, El Mutakallimūn (les orateurs), dans lequel elle s’emparait de textes d’auteurs classiques et contemporains arabes, empreints de liberté, tolérance et d’amour. Des sujets récurrents dans la discographie de Souad Massi. Au festival Le Goût des autres au Havre, la musicienne entremêle ses chansons à des extraits de Grand Seigneur, le nouveau roman de Nina Bouraoui. Les deux artistes seront dimanche 21 janvier au théâtre de l’Hôtel de ville au Havre en clôture du festival Le Goût des autres. Entretien avec Souad Massi.

Quelle place tient la littérature dans votre vie ?

Je me suis toujours intéressée à la littérature, à la poésie, aux livres, aux poètes… Ce sont mes refuges. Comme la musique. Quand je lis des romans, j’aime imaginer les personnages. Ils m’acceptent comme je suis. Dès que je découvre une histoire qui me passionne, je peux la lire deux ou trois fois. Enfant, en Kabylie, ma famille n’avait pas les moyens de partir en vacances. Avec mon frère, nous allions à la bibliothèque et nous passions nos vacances à lire. Je garde de ces moments de beaux souvenirs.

Quel genre préférez-vous ?

J’adore la poésie. J’ai beaucoup lu Baudelaire, Verlaine, Victor Hugo et les poètes arabes et perses. Plus tard, j’ai été attirée par les livres sur la psychologie.

Êtes-vous restée une grande lectrice ?

Je lisais beaucoup quand j’étais jeune. Aujourd’hui, je profite de mes nombreux voyages pour lire. Je lis aussi toujours deux livres en même temps. J’ai un ouvrage plus sérieux et un autre plus fantaisiste. Quand l’un me prend la tête, je change. C’est ma récréation.

Faites-vous un lien entre la littérature et la chanson ?

Oui, d’une certaine façon. Quand on écrit, il faut avoir une idée globale, un fil conducteur. Dans une chanson, il y a comme une introduction. Ensuite, on développe le sujet et on conclut. On peut en effet effectuer un parallèle logique. Le fait de lire apporte beaucoup de choses, débloque des métaphores… C’est toujours enrichissant. Je peux aussi repérer une phrase qui m’inspire. Je peux écrire à partir d’une phrase que j’entends.

Est-ce que vous cherchez toujours à raconter des histoires ?

Oui mais pas de manière détaillée. La chanson a un format court. J’aime écrire des chansons qui durent quatre minutes. Parfois, il y a des thèmes qui demandent à être développés avec une certaine profondeur. Le plus important, c’est d’être sincère pour que l’information puisse passer. Je ne cherche jamais à impressionner. C’est pour cela que j’adore Amin Maalouf. Avec lui, tout est facile. On se perd dans ses histoires et on se retrouve.

Est-ce que la littérature vous apaise autant que la musique ?

Oui, beaucoup. Lire permet de méditer, de marquer des silences, de faire des parallèles avec ce que vous avez vécu. On peut passer d’un état d’étonnement, à celui de la colère, de sérénité et d’acceptation. À chaque fois, je mesure la générosité d’un auteur qui peut nous faire rire et pleurer.

Comment est né le projet de lecture musicale avec Nina Bouraoui ?

J’ai été contactée par son éditeur. Nina aime mes chansons et se retrouve dans mes textes. Comme moi, je me retrouve dans ses écrits. Beaucoup de choses nous ont rapprochées. Je suis très contente de pouvoir l’accompagner musicalement dans ce projet très intime. Cela me touche.

Qu’est-ce qui vous a touché ?

Elle se met à nu dans ses écrits. Elle n’a pas peur de dire la vérité. Son écriture est à la fois simple, généreuse et poétique. Elle a beaucoup de talent. Quand nous nous sommes rencontrées, nous avons discuté un long moment. Ce projet évolue au feeling, en toute liberté.

Quels ont été vos sentiments à la lecture de Grand Seigneur ?

Avant, j’ai lu des interviews d’elle. J’avais tout d’abord besoin d’entendre sa voix, ses intonations. Je suis très sensible aux voix. Beaucoup de ses témoignages m’ont touchée. Comme son livre. Ce n’est pas évident de parler de choses intimes, de sa relation au père, de dévoiler des secrets de famille. Ce livre est comme une dernière lettre.

Infos pratiques

  • Dimanche 21 janvier à 17 heures au théâtre de l’Hôtel de ville au Havre
  • Une séance de dédicace se tient après la lecture musicale
  • Durée : 50 minutes
  • Entrée gratuite
  • Réservation au 06 37 53 30 99 ou à legoutdesautres@lehavre.fr