Denis D’Arcangelo : «  Madame Raymonde a les audaces que je n’ai pas »

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La chanson réaliste fait partie d’une tradition. Denis D’Arcangelo la perpétue avec son personnage pétillant de Madame Raymonde, créé en 1988. Cette femme qui n’a cessé de porter un regard sur les « gens de peu » leur rend hommage à travers des titres comme La Môme Frotte-Toujours, Du Gris, Je suis décadente, Tu m’as possédée par surprise, J’me voyais déjà… Madame Raymonde sera entourée du Zèbre à l’accordéon et de l’orchestre de l’Opéra de Rouen Normandie, dirigé par Hervé Niquet samedi 9 octobre au Théâtre des Arts à Rouen et dimanche 10 octobre à L’Éclat à Pont-Audemer. Entretien avec Denis D’Arcangelo.

Comment Madame Raymonde a-t-elle traversé toutes ces années ?

Elle a suivi le fil de ma vie et de l’action. Elle a pris de l’âge, des rides et des kilos. Elle a vécu le confinement. Le travail lui a manqué. La scène aussi. Ce personnage est mon double. Elle est un clown.

Quel regard porte-t-elle sur aujourd’hui ?

Madame Raymonde est une pacifiste. Elle a peur de la guerre. Elle ne veut pas voir les gens se remonter les uns contre les autres, se faire manipuler. Elle ne se met pas en colère parce qu’elle a toujours confiance et la même empathie. C’est une concierge.

Avez-vous seulement de la tendresse pour elle ?

Oui, il y a de la tendresse. Mais elle me fait aussi manger. Elle me donne accès à un répertoire, féminin et féministe, vers lequel je ne serai pas aller et que j’aime beaucoup défendre. Madame Raymonde a les audaces que je n’ai pas. Elle est vraiment culottée et décomplexée.

Changez-vous régulièrement le répertoire ?

Non, jamais d’un seul coup. J’essaie d’avoir la moitié de chansons déjà interprétées et l’autre moitié de nouveautés. Là, j’ai voulu rendre un hommage à Anne Sylvestre qui nous a quittés l’année dernière. Sa chanson parle de théâtre dont on a été privé pendant un temps. Pour un concert, je veille à un équilibre. Il ne faut que ce soit seulement une douche écossaise. Il y a des chansons sensibles, drôles. Après, je lâche un message, puis une perle de poésie. Tout cela est joliment orchestré avec le symphonique.

Quelle est la singularité de la chanson réaliste ?

C’est du théâtre en chanson. Ce sont des pièces sur les gens de peu, les incompris, les exclus, tous ceux qui vivent dans la misère. Alors ce peut être un exutoire.

Madame Raymonde fait partie de ces « gens de peu ». À l’Opéra, elle chante avec un orchestre.

C’est un beau cadeau. Je suis le premier très ému. J’aime la fantaisie qu’apporte Hervé Niquet. Il connaît bien le monde du cabaret. Je le vois dans ses indications qui ont la couleur du music-hall. Cela fait que nous sommes sur la même longueur d’onde.

Est-ce que cela vous permet de redécouvrir ce répertoire que vous connaissez bien ?

Oui parce que l’on décortique les chansons. En faisant ce travail, il y a toujours des découvertes, des nuances qui surgissent. Cela me permet dans l’interprétation d’insister sur telle couleur ou telle nuance, de donner davantage de relief à tel endroit.

Infos pratiques

  • Samedi 9 octobre à 18 heures au Théâtre des Arts à Rouen. Durée : 1h30. Tarifs : de 32 à 10 €. Pour les étudiants : carte Culture. Réservation au 02 35 98 74 78 ou sur www.operaderouen.fr
  • Dimanche 10 octobre à 16 heures à L’Éclat à Pont-Audemer. Tarifs : 20 €, 15 €. Réservation au 02 32 41 81 31 et sur http://eclat.ville-pont-audemer.fr