Emem : « Les comics ont comblé une envie d’émerveillement »

photo : Cécile Gabriel

Le nom de Emem est associé à celui de Fred Duval. Le premier est dessinateur, le second, scénariste. Les deux sont Normands. Emem, Mathieu Ménage, a pris en cours la série Carmen McCallum et travaille sur Renaissance où des extraterrestres débarquent pour sauver une Terre, frappée par des bouleversements climatiques. Il est l’invité d’honneur de Normandiebulle, le festival de la bande dessinée à Darnétal qui se déroule samedi 25 et dimanche 26 septembre. Pendant ces deux jours, Emem sera présent pour des dédicaces et une exposition des planches originales de Renaissance. Entretien.

Vous êtes l’invité d’honneur de Normandiebulle. Ça fait du bien ?

Cela fait plaisir de voir revenir les festivals. Depuis la rentrée, nous sommes surpris de pouvoir nous retrouver. Nos espaces de rencontre, entre dessinateurs, entre dessinateurs et public, avaient disparu. Tout cela a un air nouveau. Être invité d’honneur, c’est la reconnaissance d’un travail sur le long terme. Cela fait une vingtaine d’années que je suis auteur. Ma carrière a commencé plutôt de manière discrète. J’ai ensuite gravi les échelons, avec des succès. C’est aussi la reconnaissance de la continuité de mon travail avec la sortie d’un album tous les ans. Bon gré, mal gré.

Pourquoi cette constance est-elle importante ?

C’est un rythme qui me va bien et qui impose une régularité dans le travail. Si je n’avais pas cela, j’aurais peur d’être perdu. Cette autodiscipline est essentielle. Je dois faire un album, être devant ma table de dessin tous les jours. Quand je redémarre une bande dessinée, je garde en tête la date de sortie. Cela me sert de fil conducteur.

Est-ce que cela permet aussi de trouver très vite son style ?

Le trait évolue au fur et à mesure des années, en fonction de ce que je peux voir, lire, entendre. Ce qui me touche dans tous les domaines m’influence. Je ne dessinerais pas de la même façon une histoire de science fiction et un fait historique, avec tel ou tel scénariste. J’essaie de m’adapter.

Avec un scénariste, il faut alors une complicité.

Vous faites bien de parler de complicité. Elle est là avec Fred Duval. Cela fait quatorze ans que nous collaborons ensemble. Il y a maintenant des choses que nous n’avons plus besoin de formuler. Je comprends son découpage. Je discerne des choses en sous-texte. Au début, même si Fred n’était pas du tout directif, il est possible qu’il y ait eu des incompréhensions. Parce qu’il y avait des choses que je ne saisissais pas aux premiers abords. Même dans les traductions, il peut y avoir des contresens. Désormais, je comprends de manière intuitive.

Parvenez-vous toujours à vous surprendre ?

Au tout début du travail, Fred ne m’envoie pas forcément tout le scénario. Il peut ne pas y avoir la fin de l’histoire. L’écriture se fait au fur et à mesure. On sait néanmoins où l’on va. Ce sont les discussions en cours qui nourrissent le travail. L’un peut rebondir sur l’idée de l’autre. Sur Renaissance, il y a aussi, au graphisme, Fred Blanchard qui apporte des surprises. Dans notre travail, je me pose comme premier lecteur et je suis le premier surpris. Je prends le découpage comme un moment de lecture, ne sachant pas ce qu’il va se passer dans le déroulé.

Qu’est-ce qui vous a amené jusqu’aux comics ?

J’ai commencé par les classiques, comme Tintin. Enfant, je n’avais pas vraiment accès à la lecture de bandes dessinées. J’ai pu lire les comics parce qu’ils paraissaient dans les maisons de la presse. Ils étaient donc plus accessibles. Les comics ont comblé une envie d’émerveillement, d’extraordinaire, d’ailleurs. J’habitais dans un village à la campagne et l’extraordinaire n’est pas le lot quotidien. Cette envie a continué tout au long des années. Ce goût pour les univers autres s’est alors développé.

Pour dessiner ces séries, est-il besoin de vous documenter auprès des scientifiques et chercheurs ?

Oui et non. Je suis curieux de nature. Renaissance traite d’un sujet pour lequel je me documente régulièrement. Je fais des recherches pour moi. Ce qui nourrit mon travail. Au fil des années, j’ai aggloméré beaucoup de connaissances.

Les prévisions concernant notamment le devenir de la planète ne sont pas joyeuses. Restez-vous optimiste ?

J’ai une bouffée d’espoir. Je crois en l’intelligence et en l’utilisation de cette intelligence. Dans Renaissance, ces extraterrestres viennent pour sauver la Terre.

Est-il difficile de vous séparer d’un personnage ?

Cela ne m’est encore jamais arrivé. Carmen continue son chemin sous d’autres traits avec un dessinateur. Avec Renaissance, je retrouve les personnages tous les ans. Pour l’instant, je ne me projette pas sur la fin, dans deux ans. Peut-être qu’il y aura un contrecoup. Je pense que j’aurais quand même un pincement au cœur.

Infos pratiques

  • Samedi 25 et dimanche 26 septembre de 10 heures à 18 heures aux Tennis couverts, allée de La Gare à Darnétal.
  • Tarifs : 6 €, 4 € la journée, 8 €, 6 € les deux jours, gratuit pour les moins de 16 ans, les étudiants de l’Université de Rouen et les porteurs de la carte Atout Normandie
  • Renseignements sur www.normandiebulle.com

Relikto et Normandiebulle vous font gagner des entrées

  • Gagnez vos entrées pour Normandiebulle, le festival de la bande dessinée, à Darnétal. Pour participer, il suffit d’envoyer un message à hello@relikto.com