Hugh Coltman : « nous avons un peu marché sur un fil »

Photo : Bonze

Dr. John fait partie des légendes du blues. C’est le personnage de Malcom John Rebennack (1941-2019) qui s’est inspiré d’un prêtre vaudou. Pianiste, compositeur et chanteur, prolifique, attaché à la Nouvelle-Orléans où il est né, il a « envoûté » avec sa musique allant du rhythm’n’blues au rock en faisant un détour par le jazz et le funk. Matthis Pascaud et Hugh Coltman n’ont pas résisté et lui ont rendu un hommage dans cet album, Night Trippin’. Le guitariste et le chanteur ont privilégié la période des années 1960, les albums Babylon et Gris-Gris, dans ces reprises rock et vibrantes. Ils seront jeudi 24 novembre à La Traverse à Cléon. Entretien avec Hugh Coltman.

Avec quel titre avez-vous découvert le Dr. John ?

J’ai découvert la musique du Dr. John il y a longtemps. C’était sur un album de Paul Weller qui avait fait une reprise. J’ai complètement trippé sur ce morceau, I Don’t wanna know. J’ai voulu en savoir plus sur ce mec. J’ai remonté le fil pour arriver à son premier album. Depuis vingt ans, je creuse. J’adore faire ce travail parce que cela enrichit une écoute et permet de regarder une œuvre dans son ensemble. On se rend aussi compte de tout ce que Dr. John a pu apporter.

Qu’est-ce qui vous a fait trippé, comme vous dites, lors de cette écoute ?

C’est davantage la version de Paul Weller. Il y a une réelle profondeur.

Qu’avez-vous retenu de Dr. John lors de vos recherches ?

Il était complètement taré mais le personnage était très intéressant. Je ne le connaissais pas du tout. Dr. John a connu des phases ascendantes et descendantes. Il y a, chez lui, cette idée de trouver un concept, une marque de fabrique. Et il s’est construit un sacré personnage comme une sorte de gourou ou de guérisseur du XVIIIe siècle. Il menait de véritables recherches. Avec lui, on est loin des sphères commerciales. Plusieurs musiciens se sont aussi penchés sur sa musique. 

Comment est venue cette idée de reprises des titres de Dr. John ?

J’ai travaillé plusieurs fois avec Matthis Pascaud qui est venu remplacer le guitariste du groupe. Après les concerts, nous avons coutume de parler de musiques, d’artistes qui nous branchent. Matthis m’a fait part de cette idée. Il savait que nous avions cet artiste en commun. Nous avons sorti les guitares et nous avons joué.

Quel a été votre fil conducteur dans ce travail ?

Dans les titres de Dr. John, il y a un riff qui se répète. C’est très improvisé. Nous nous sommes posé cette question : comment les reprendre ? Pour ne pas être ridicules, nous avons décidé de travailler à sa manière : en improvisant et en toute liberté. Nous avons enregistré tous en même temps, sans casque, et avec ma voix dans un micro normal et reprise dans un ampli de guitare. Le but n’était pas de rendre tout parfait. Dans le studio, nous jouions un morceau deux ou trois fois et nous enregistrions. Nous avons un peu marché sur un fil mais ce fut libérateur.

Pourquoi vous êtes-vous concentrés sur une période ?

Avec Dr. John, on passe par différents styles. Il y a des disques très psychédéliques, après très Nouvelle-Orléans, ensuite plus funk, puis plus blues… C’était assez difficile de piocher dans différentes périodes. Comme j’avais déjà travaillé avec une guitare de la fin des années 1960 et du début des années 1970, cela a orienté nos choix. Nous avons commencé par Mama Roux avec ce côté très groove, dépouillé et plus folk.

Quel est le plaisir à chanter des titres d’un autre artiste, notamment ceux de Dr. John ?

C’est très agréable. J’aime beaucoup chanter mes chansons mais s’emparer de celles des autres est, oui, très agréable. D’autant que nous les avons adaptées. C’est comme si elles étaient un peu de nous. Cela m’a amené à chanter différemment. Ma voix est plus graveleuse. J’ai aussi beaucoup aimé travailler avec Matthis. Il me surprend par sa maturité à la guitare. Il a une richesse musicale incroyable.

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