Pierre-Emmanuel Rousseau revient à Rouen et à Rossini

photo : Suzanne Schwiertz

C’est une histoire de trahison et de vengeance. Tancrède de Rossini reste une pièce lyrique très peu reprise dans les répertoires des salles. Elle est mise en scène du 12 au 16 mars par Pierre-Emmanuel Rousseau qui revient à l’Opéra de Rouen Normandie.

Dans cette tragédie, il y a Tancrède, un mercenaire. « C’est un anti-héros, remarque Pierre-Emmanuel Rousseau. Il a une conduite suicidaire et erratique. Il se bat sans conviction et se donne aux plus offrants. C’est un homme qui a un désir de vengeance. Il poursuit juste cet objectif. Même dans son rapport amoureux, il est aveuglé par cette histoire d’honneur. Il est persuadé qu’Amenaïde l’a trahi et il ne va lui laisser aucune chance ». Amenaïde, elle, ne cesse de le répéter : « mon cœur est innocent ». La jeune femme ressent un amour absolu pour Tancrède. « Elle parvient toujours à se relever après les épreuves. Elle veut aller vers la lumière. En fait, tous les deux sont sur un chemin de croix », explique le metteur en scène.

Tancrède et Amenaïde sont les personnages principaux de l’opéra de Rossini, Tancrède, présenté du 12 au 16 mars au Théâtre des Arts à Rouen. Cette pièce en deux actes, créée à Venise en 1813, est inspirée d’un texte de Voltaire. L’histoire se déroule à Syracuse où se termine la guerre civile après une alliance entre Argirio et Orbazzano. Le premier accepte alors le mariage entre sa fille, Amenaïde, et le second. Or la jeune femme est amoureuse de Tancrède qui l’accuse alors d’infidélité. Orbazzano la considère par ailleurs comme une traitre lorsqu’il interprète mal une lettre destinée à Tancrède et il l’envoie en prison.

Une œuvre redoutable

Après Le Barbier de Séville et Le Comte Ory, Pierre-Emmanuel Rousseau revient à Rouen, sa ville natale, et à Rossini. « Tancrède est une œuvre extrêmement sombre. J’ai d’ailleurs toujours eu plaisir à faire des choses tristes ». Le metteur en scène transpose l’opéra de Rossini dans un Moyen-Âge « tout noir avec quelques éclats d’or. Il y a une atmosphère mortifère. J’ai pensé à Caravage et Maurice-Quentin de La Tour avec leurs peintures en clair-obscur ». Avec Tancrède, Pierre-Emmanuel Rousseau a pris un autre plaisir. Celui d’explorer les zones d’ombre des personnages, à la limite de la folie. « Nous sommes là dans la tragédie racinienne, dans un théâtre d’états d’âme et non d’action. Nous entrons dans les méandres psychologiques. Il faut se laisser porter par ces grands sentiments universels. Nous sommes sur des choses très profondes et très ténues ».

Il y a bien évidemment la beauté de la musique de Rossini, interprétée par l’orchestre de l’Opéra de Rouen Normandie, dirigé par George Petrou. « Tancrède est une des plus belles pages de la musique classique. C’est vraiment très beau, notamment le moment où il meurt, c’est une bougie qui s’éteint. L’effet est saisissant. Cela vaut le coup de monter cet opéra rien que pour cet air ». Pour interpréter cet opéra de Rossini, il est indispensable de réunir, selon Pierre-Emmanuel Rousseau, « des chanteurs exceptionnels. Tancrède demande de grandes qualités vocales. Chaque air est un Everest. Tous sont redoutables et au service de l’expression. Certains peuvent être très longs. Lors de ces moments, l’action s’arrête et c’est du pur plaisir vocal. Nous avons ici un plateau idéal » avec Teresa Iervolino (Tancrède), Marina Monzó (Amenaïde), Santiago Ballerini (Argirio), Giorgi Manoshvili (Orbazzano), Juliette Met (Isaura) et Bénoît-Joseph Meier (Riggiero).

Infos pratiques

  • Mardi 12 et jeudi 14 mars à 20 heures, samedi 16 mars à 18 heures au Théâtre des Arts à Rouen
  • Durée : 3 heures
  • Tarifs : de 68 à 10 €. Pour les étudiants : carte Culture.
  • Réservation au 02 35 98 74 78 ou sur www.operaderouen.fr
  • Aller à l’opéra en transport en commun avec le réseau Astuce